JANE AUSTEN – Orgueil et préjugé -
Voilà, mon aimable cousine, ce qui vous explique en général l’intention que j’ai de me marier. Il me reste à vous dire pourquoi j’ai été conduit à porter mes vues sur votre famille, au-lieu de me marier dans mon voisinage où il ne manque pas, je vous assure, de fort aimables personnes. Étant appelé à hériter de la terre de Longbourn, après la mort de votre respectable père (lequel, au reste, peut vivre encore longtemps), j’ai voulu choisir ma femme parmi ses filles, afin que la perte à laquelle elles seront appelées fût aussi petite qu’il est possible, lorsque ce triste événement arrivera, chose qui, ainsi que je viens de le dire, peut être encore très éloignée. J’espère, ma belle cousine, qu’un tel motif est de nature à augmenter l’estime que vous pouvez avoir conçue pour moi ; et il ne me reste qu’à vous assurer dans les termes les plus passionnés de toute la violence de mon attachement pour vous. Quand à la fortune, c’est un objet qui m’est tout à fait indifférent. Je ne demanderai point de dot parce que je sais que votre père ne pourrait pas vous en donner une. Tout ce qui doit vous revenir, c’est mille livres sterling, dans les quatre pour cent, après la mort de votre mère. Je ne dirai donc mot sur le chapitre de la fortune ; et vous pouvez être assurée qu’une fois que nous serons mariés, vous n’aurez à essuyer de ma part aucun reproche peu généreux. »
Il devenait nécessaire de l’interrompre, aussi Elisabeth, s’écria-t-elle : « vous oubliez, monsieur, que je ne vous ai pas encore, répondu. Je vous remercie de tous vos beaux compliments, et de l’honneur que vous voulez bien me faire, mais il m’est impossible de ne pas le refuser. „
Ce n’est pas d’aujourd’hui, » reprit gravement Mr. Collins, « que je sais qu’une jeune demoiselle rejette toujours la première demande d’un homme, qu’au fond du cœur elle se réserve d’accepter. Quelquefois même elle renouvelle son refus deux et trois fois. Je ne suis donc nullement découragé, et j’espère avant qu’il soit longtemps avoir, ma belle cousine, le plaisir de vous conduire à l’autel. „
« C’est un peu fort, » s’écria Elisabeth ». « après ce que je viens de vous dire si positivement. Je vous répète, monsieur, mon refus formel et positif. Vous ne pourriez pas me rendre heureuse ; et je suis la personne la moins propre à faire votre bonheur. Je suis convaincue que votre amie lady Catherine seroit la première à en juger ainsi. » Orgueil et préjugé –chapitre 19