L’ETAT
« Si l’Etat est fort, il nous écrase ; s’il est faible, nous périrons » écrit Paul Valéry soulevant ainsi le problème du rôle et de la légitimité de l’Etat vis-à-vis des citoyens et de la société sur lesquels il exerce son pouvoir.
Mais que désigne véritablement l’ETAT ?
D’une façon générale, l’État désigne un territoire et sa population soumis à l’autorité d’un gouvernement. (La France, La Chine sont des Etats par exemple).
Cependant de façon plus spécifique, l’Etat désigne une forme d’organisation du pouvoir liée à des institutions et des lois qu’on nomme le pouvoir politique.
Le terme politique a pour origine le mot grec POLIS qui désigne la Cité (comme Athènes ou Sparte par exemple) dans laquelle les rapports entre les individus sont fixées par des lois.
Le pouvoir politique, celui de l’Etat, est donc le pouvoir d’établir des lois qui organisent la vie des hommes dans la société.
Pierre Clastres distingue ainsi les sociétés dans lesquelles, c’est le pouvoir de l’Etat qui prédomine et celles dans lesquelles le pouvoir découle soit de l’autorité d’un chef (pouvoir nommé charismatique) soit de l’autorité des traditions et coutumes (pouvoir dit traditionnel).
Quels débats suscite le pouvoir de l’ETAT ?
L’Etat se présente comme un pouvoir légitime, il détient selon les termes du sociologue Max Weber , « le monopole de la violence légitime ». Or cette phrase est déjà un paradoxe car la violence est un abus de force et ne semple en aucun cas justifiable mais cette formule est aussi révélatrice puisque l’Etat a le pouvoir de sanctionner les individus qui contreviennent à ses lois (y compris dans certains cas par la peine de mort).
Dans quelle mesure ce pouvoir est-il alors légitime ?
D’un côté, on peut justifier l’existence de l’Etat parce qu’il joue un rôle nécessaire pour établir l’ordre, la sécurité et permet de garantir la stabilité de la société. L’étymologie du mot Etat renforce cette idée : provenant du latin « stare » qu’on traduit par « rester », « maintenir » , l’Etat permettrait à la société de se maintenir dans son unité et son intégrité.
Cependant l’Etat peut aussi être dénoncé comme un organe extérieur à la société qui vit à son détriment et qui pourrait même la mettre en danger avec les guerres qu'il peut déclencher. Les questions des libertés individuelles et de l’égalité sont également mises en avant pour contester le rôle de l’Etat ou l’oppression exercée par les détenteurs des pouvoirs politiques.
Toutefois ces débats sur l’utilité, les avantage, les inconvénients, les risques de l’Etat reposent sur un présupposé « individualiste » selon lequel l’individu pourrait exister sans l’Etat or ce présupposé peut lui-même être interrogé.
Les liens entre société et Etat d’une part et l’Homme et la politique de l’autre sont-il seulement conventionnel ou bien naturels comme le soutient Aristote qui pense que l’humain se définit par son appartenance à une communauté politique : il écrit en ce sens : « L’Homme est un animal politique » dans son texte Les politiques. Qu’exprime alors l’appartenance à un Etat ? Quels sont les liens crées entre les membres de cet Etat ? Sont- ils établis sur un simple calcul d’intérêt ?
I : La Légitimité de l’ETAT
1/ L’Etat est nécessaire pour assurer la sécurité
HOBBES – LE LEVIATHAN
Théorie du pacte social
A : état de nature = guerre de tous contre tous -> conséquences désastreuses --> les hommes cherchent un moyen d'échapper à cette situation.
B : pacte social = pacte de non agression à mise en place d’un pouvoir commun à établissement de lois assurant la sécurité. Les Hommes renoncent à leurs libertés sans limites (droits sur toutes choses) et reçoivent en retour la sécurité.
Critique du modèle de Hobbesien par Rousseau : risque du despotisme
Le despotisme est la forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté est exercée par une autorité unique (une seule personne ou un groupe restreint) qui dispose d'un pouvoir absolu. Le despotisme implique souvent un pouvoir autoritaire, arbitraire, oppressif, tyrannique, sur tous ceux qui lui sont soumis.
2/L’Etat est nécessaire pour établir une égale liberté entre les Hommes
Rousseau critique l’Etat dans lequel les riches font les lois et qui correspond pour simplifier à la société de son époque mais il propose aussi un modèle de l’Etat établi sur le contrat social, véritable union des citoyens pour vivre librement tout en respectant l’ordre des lois.
Le principe est que les hommes doivent eux-mêmes voter les lois qu’ils suivront. La loi doit être l’expression de la volonté générale. Obéir à la loi qu’on s’est donnée est une façon d’être autonome car selon la formule de Rousseau « l’impulsion du seul appétit (désir) est esclavage, l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté ».
De plus, si la loi est faite par tous et pour tous cela permettra à chacun d’avoir la même liberté.
Toutefois ce modèle du Contrat social se trouve lui-même critiqué comme un idéal irréalisable.
II Les critique de l’ETAT
L'Etat un danger pour les Hommes
La puissance de l’Etat peut se retourner contre les citoyens : Nietzsche écrit « L’Etat est le plus froid des monstres froids ». Cette citation préfigure les systèmes totalitaires mis en place au XXème siècle (nazisme, stalinisme) qui ont conduit à l’extermination de millions de personnes.
L’Etat renforce les inégalités:
Marx dénonce l’Etat dominé par la classe bourgeoise. Celle-ci utilise les structures de l’Etat pour mettre en place une idéologie qui renforce l'exploitation du travail des prolétaires. Marx milite pour la révolution et la mise en place d’une société sans classe qui n'aura plus besoin d'un Etat. Cependant l’Etat conserve un rôle important pendant la phase de transition entre la société capitaliste et la société communiste.
Les courants anarchistes (Proudhon, Bakounine) rejettent également l’Etat et souhaitent une société dans laquelle les Hommes pourrait s’organiser sous forme de l’autogestion. (Petites communautés dans laquelle il n’y aurait de chef).
III Etat de droit et Etat despote
Il est nécessaire de bien distinguer l’Etat qui respecte les règles du droit et les états « despotes » qui ne connaissent que la loi du plus fort.
Quelles sont les caractéristiques d’un Etat de droit
L’exigence démocratique est l’un des fondements de l’Etat de droit. Comme Rousseau le souligne, la question de la souveraineté est fondamentale. L’Etat de droit reconnaît la souveraineté du peuple. A ce titre le gouvernement n’est que l’exécutant de la volonté du peuple. Il doit donc être élu par le peuple et rendre compte à échéance régulière de son exercice.
La nécessaire séparation des pouvoirs : Montesquieu dans son œuvre De l’esprit des lois souligne l’importance de la séparation des pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire) pour éviter les abus du pouvoir.
Le respect des droits humains. Le droit positif (ensemble des lois en établit par l’Etat) doit aussi se conformer aux droits naturels – les droits fondamentaux mais sur ce point des débats persistent pour établir la « liste » de ces droits. Le fait de ne pas être persécuté en raison de ses opinions politiques ou religieuses est clairement admis comme un droit fondamental mais d’autres droits sont encore discutés (droit à l’éducation , à la santé…).
Conclusion :
Le Rôle du citoyen
Tocqueville dans son œuvre De la démocratie en Amérique souligne les risques qu’encoure la société démocratique : celui d’un nouveau despotisme lié au désintérêt des citoyens pour les questions politiques. Préférant s’occuper de leurs conforts et de leurs intérêts personnels, ces derniers délaissent alors à une administration douce et prévoyante le soin de s’occuper des affaires publiques. Ils tombent de ce fait dans une sorte de servitude volontaire dont ils pourront difficilement sortir. Cependant l’Histoire rappelle aussi que le bonheur privé et étroitement lié à un destin collectif et exige donc une implication de chacun dans la vie et le fonctionnement des institutions publiques.
--------------------------------------------------------